mercredi 4 février 2009

Drake, Fermi et plein de civilisations extraterrestres.

Drake, vous vous souvenez, l'accordeur de piano dont William avait parlé ici-même!

Puisque vous avez la flemme de cliquer, je résume. En 1961, Frank Drake a jeté les bases toutes simples permettant d'estimer le nombre potentiel de civilisations extraterrestres dans notre Galaxie avec lesquels nous pourrions avoir un contact. Les choses se résument à une simple équation :

N = R * f(p) * n(e) * f(l) * f(i) * f(c) * L
N est le nombre de civilisations extraterrestres dans notre galaxie avec lesquelles nous pourrions entrer en contact,
R est le nombre d'étoiles en formation par an dans notre galaxie,
f(p) est la fraction de ces étoiles possédant des planètes,
n(e) est le nombre moyen de planètes par étoile potentiellement propices à la vie,
f(l) est la fraction de ces planètes sur lesquelles la vie apparaît effectivement,
f(i) est la fraction de ces planètes sur lesquelles apparaît une vie intelligente,
f(c) est la fraction de ces planètes capables et désireuses de communiquer,
L est la durée de vie moyenne d'une civilisation.

Si la valeur de R est connue avec assez de précision (+/- 10 étoiles/an), les autres valeurs restent inconnues, et six inconnues pour une seule équation, c'est carrément trop pour espérer une solution unique.

Mais Enrico Fermi était d'origine romaine. Il a donc retourné le problème et imaginé une civilisation extraterrestre lancée à la conquête de la Galaxie (limitée par la vitesse de la lumière). Cette civilisation progresserait par bonds, s'arrêtant quelques siècles sur chaque nouvelle planète, puis enverrait de nouveaux vaisseaux pour poursuivre son expansion. La relative lenteur de progression serait largement compensée par la multiplication des vaisseaux, en manière telle que, après quelques centaines de milliers d'années seulement, la totalité de la Galaxie serait colonisée (1).

Or, de contact extraterrestre, il semble que nous n'en ayons pas eu. Tel est le Paradoxe de Fermi.

Plusieurs hypothèses sont possibles (de tel sorte que ce paradoxe n'en est pas vraiment un bien sûr) :
  1. Les civilisations extraterrestres n'existent pas ;
  2. Les civilisations extraterrestres existent, mais il leur est impossible de nous contacter ;
  3. Les civilisations extraterrestres existent, ont développé la technologie pour nous visiter, mais ne l'ont pas fait ;
  4. Les civilisations extraterrestres existent et nous ont visités, mais ne signalent pas leur présence ;
  5. Les civilisations extraterrestres existent, nous ont visités et ont communiqué avec nous, mais leur existence n'a pas été officialisée ;
  6. Les civilisations extraterrestres existent et nous sommes celle qui visitera la galaxie ;
  7. Les civilisations extraterrestres existent, mais considèrent le système solaire comme peu propice ;
  8. Les civilisations extraterrestres existent, mais s'autodétruisent avant de contrôler le voyage intersidéral ;
Eh bien, il y a à peine 48 heures (2), une autre hypothèse vient d'apparaître, aux termes de laquelle aucun paradoxe ne se dégagerai de la présence de plusieurs centaines de civilisations extraterrestres avancées au sein même de notre Galaxie!

Dans un papier datant du 2 février et publié sur arXiv (Broadcasting but not receiving: density dependence considerations for SETI signals), Reginald D. Smith du Bouchet-Franklin Institute de Rochester considère un élément négligé : il existe une distance au-delà de laquelle un signal extraterrestre devient si faible qu'il ne peut plus être détecté.

L'étude propose un modèle quantitatif qui repose sur une équation de Drake à laquelle est injectée la distance maximale moyenne d'émission d'un signal extraterrestre. Cette équation de Drake 2.0 permet d'estimer une densité de peuplement minimale de la Galaxie en-deçà de laquelle il est peu probable qu'un contact puisse s'établir.

Smith démontre ainsi que l'absence de communication pointée par Fermi peut simplement s'expliquer par une densité de peuplement trop faible : « Assuming the average communicating civilization has a lifetime of 1,000 years, ten times longer than Earth has been broadcasting, and has a signal horizon of 1,000 light-years, you need a minimum of over 300 communicating civilization in the galactic neighborhood to reach a minimum density. »

Ce qui, m'assure le fils du voisin, est un truc de ouf!

Et Shakespeare là-dedans? C'est ici, dans Hamlet (I.v.174-75) : « There are more things in heaven and earth Horatio, than are dreamt of in our philosophy. » 


Notes
(1) Oui, le principe de la réaction en chaîne qui devait occuper Fermi aussi en dehors de ses heures de boulot.
(2) C'est dire à quel point vous avez eu le nez fin de vous être affilié à ce blog! 


Sources
[1] arXiv:0901.3863v1 [physics.gen-ph]
[2] QI132 : Du nombre d'accordeurs de pianos à Chicago
[3] Wikipedia : Équation de Drake
[4] Wikipedia : Paradoxe de Fermi

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